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Composer le son – Hommage à J.C. Risset

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Lecture – CDMC, Paris, France, le Vendredi 23 novembre 2018

« la synthèse imitative permet de mettre en contact étroit les mondes sonores réel et virtuel » et que « les sons électroniques jouent le rôle des partenaires illusoires et virtuels ». Dans son esthétique et dans ses pièces mixtes il souligne toujours l’importance de l’hybridation entre sons acoustiques et créations sonores numériques. « La synthèse imitative permet de prolonger l’harmonie dans le timbre de certains instruments, […] elle permet d’échapper aux contraintes mécaniques et de jouer avec la perception pour proposer une esthétique d’illusion »
Résumé d’une conférence de Jean-Claude Risset de 2011 « Mutation : de la grammaire au vocabulaire musical … »

Jean-Claude Risset est le premier à avoir énoncé le lien naturel qui va de la synthèse du son à la simulation de ses causes : le geste et l'instrument, qui constitue la base de la synthèse par modèle physique et des systèmes gestuels à retour d'effort.

Je proposerai un point de vue d'où l'on peut envisager une "composition de l'instrument" et une "composition du geste" comme pôles participant à la création musicale.

Je propose, pour parler de « composition », d’ouvrir le rapport que je considère comme trop étroit avec la temporalité. Pierre Boulez, au moment des réflexions qui accompagnaient la création de l’IRCAM, et en particulier lors du séminaire de Baden-Baden, auquel j’ai eu la chance de participer, grâce à la recommandation de Jean-Claude Risset, exprimait l’une de ses attentes par rapport à l’informatique, qui était de pouvoir « composer »… en temps réel … pour faire court, d’aller plus vite que la musique dans le processus de composition
Le sujet est loin d’être épuisé. En revanche, les possibilités qui se découvrent à travers la simulation, par exemple par modèle physique, et qui a bien un rapport avec le temps, est la possibilité de « fabriquer » des instruments (fussent-ils virtuels, mais c’est le tribut à payer) dans une temporalité qui ne s’écarte pas beaucoup du temps de l’expérience, de la découverte, des conditions du jaillissement et qui n’est pas le temps de la performance.
… Avec une nouveauté : composer ensemble, lors de la performance elle-même, des gestes…
… puis, et ceci est grâce à l’ordinateur : tout peut être enregistré, écrit, gardé, …
ce qui donne accès à … la composition composée instrument – geste - son

Je voudrais alors dédier à Jean-Claude cette pièce, Quetzalcoalt, que je viens de réaliser.
Créée le 10 novembre 2018, à l’occasion du festival Micromusic de la Ville de Romans, dans le cadre du projet EASTN-DC. Dans cette pièce, j’utilise des instruments virtuels composés et joués en temps différés par des « gestes composés »…, combinés (composés) avec une scène instrumentale virtuelle préalablement composée, mais jouée, simultanément, en temps réel par deux instrumentistes agissant sur deux claviers à retour d’effort.
Les instruments virtuels sont de deux catégories :
(1) Un ensemble de 10 000 oscillateurs physiques simples (masse-ressort) dont les fréquences sont distribuées équiprobablement sur tout le spectre audible, et qui peuvent tous être joués individuellement, séparément ou par groupes pré-définis,
(2) un très grand gong virtuel, incluant dans sa modélisation les propriétés de non-linéarité qui conduisent, lorsque leur énergie vibratoire est importante, à cet effet très frappant, dans les gongs et autres instruments basés sur des plaques minces, vers le chaos

Alors, les modes propres du gong frappé à faible amplitude, qui sont parfaitement bien déterminés et connus dans le cadre même du système de modélisation GENESIS, sont recherchés au sein même de cette « galaxie » d’oscillateurs individuels.
Deux modes de jeu sont alors mis en œuvre, aussi bien dans la composante réalisée en temps différé que dans celle qui est jouée en temps réel :
(1) l’un égrène des séquences de percussions simples sur les sous-ensembles modaux reconnus,
(2) l’autre résulte de percussion globale sur le gong lui même, en hommage à l’œuvre de Jean-Claude Risset « Mutations » (1969).